Terres
promises, Bénédicte Dupré Latour (Pocket, 08/2025)
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Cap sur l’Amérique du XIXème siècle, la ruée
vers l’or et la Conquête de l’Ouest. Nous y rencontrons une poignée de
personnages dont l’histoire, à un moment donné, croisera le parcours de l’un ou
de l’autre…
« Eleanor Dwight remontait ses bas
reprisés, des bas qui ne connaissaient que la grande salle et le lit, le lit et
la grande salle. Elle s'observa dans le petit miroir qu'elle tenait de Wendy
Sparrow, sa chère sœur de silence. Elle l'aimait plus encore que son propre
sang. Sœur de misère, sœur des mauvais temps. » Le roman s’ouvre avec le personnage d’Eleanor. On découvre sa misérable
condition de prostituée au milieu des chercheurs d’or qui dépensent leurs
trouvailles aurifères pour quelques instants de douceurs. Les portraits
suivants nous permettront de mieux comprendre le parcours de cette pauvre
femme.
« Toi, mes frères, tous ceux qui
jouissent d'être des conquérants, vous êtes tous des usurpateurs, des traitres.
Mais tu le sais aussi au plus profond : les possessions finissent toujours par
nous posséder. Désormais, tu es prisonnier de tes terres. Tu es prisonnier de
Mère. Et tu pleures, le visage enfoui dans les robes de Susan. » Ces colonisateurs venus du Vieux continent ont de bien grandes espérances.
Mais au milieu d’une nature hostile, les instincts bestiaux réapparaissent. Les
premières victimes ? Les femmes. Puis les enfants.
« La vie n'était pas finie, elle ne
s'arrêtait pas là, dans ce bourg minuscule, aux ambitions minuscules, où l'on
n'avait le choix que du labour ou du bétail. La terre ou la viande, voilà ce
qu'offraient les grandes perspectives de ces paysages infiniment plats, où
l'horizon se dévidait à perte de vue, comme s'il n'y avait plus rien à
découvrir. » Partout sur Terre, le
constat est le même : il faut travailler pour pouvoir survivre. Les
pépites découvertes ne feront la fortune que de quelques- uns. Les autres se
perdront dans l’alcool ou dans des confrontations avec ceux qu’ils qualifient
de « sauvages ».
Au final, un roman choral
qui donne la parole à divers protagonistes qui sont mis en scène dans le cadre
de la Ruée vers l’or. Les hommes sont réduits à leurs instincts les plus
bestiaux, et les femmes ne sont plus que des pantins sur lesquels on s’allonge.
Une crudité dans les propos, une poésie dans le style et un air de vérité
dérangeante qui, cumulés, font qu’on dévore ce roman aux allures de western.