lundi 30 août 2021

Premier sang, Amélie Nothomb (Albin Michel, 08/2021)

 


Premier sang, Amélie Nothomb (Albin Michel, 08/2021)

💕💕💕💕💕

 Le cru 2021 de la dame au chapeau serait- il celui qui me réconcilierait avec l’œuvre de celle- ci ? Durant des années, j’ai attendu avec avidité la sortie du Nothomb annuel, le précommandant parfois même… jusqu’en 2008 : « Le fait du prince » m’a déçue au point de tirer un trait sur les écrits de cette auteure. Un autre essai en 2019 avec « Soif » m’avait d’ailleurs confirmé que la plume d’Amélie Nothomb m’agaçait bien plus qu’elle ne m’avait jadis emportée. Et voilà que cette année, les critiques littéraires lues jusqu’à ce jour sont unanimes : « Premier sang », son trentième roman, fait partie des incontournables de la rentrée et l’écriture d’Amélie Nothomb a changé !

 

« Le présent a commencé il y a vingt- huit ans. Aux balbutiements de ma conscience, je vois ma joie insolite d'exister. » Ici l’auteure se met dans la peau de son propre père pour s’exprimer à la première personne et revenir sur des éléments marquants de la vie de celui- ci. Une biographie intime, un hommage à un père au parcours familial insolite et au sang- froid remarquable et remarqué pour lequel « Il ne faut pas sous- estimer la rage de survivre ».

 

« Je n'avais jamais encore rencontré la haine. Il m'était donné d'y assister en direct et j'aurais payé cher pour être ailleurs. Je ne savais pas qu'à l'âge de Jean, mépriser son père allait de soi. » Orphelin de père très jeune et fils unique, Patrick Nothomb va longtemps être en manque de famille. A l’âge de six ans, il ira passer ses vacances d’été chez son grand- père, Pierre Nothomb, un poète noble et désargenté, dans un château ardennais, au Pont- d’Oye, où les us et coutumes se sont arrêtés au Moyen- Age. Au contact d’une floppée d’enfants de tous les âges, Patrick va apprendre à lutter contre la faim, le froid, mais aussi à se confronter aux autres.

 

« L'enfance a cette vertu de ne pas essayer de répondre à la sotte question : "Est- ce que j’aime ?" Il y a beaucoup d’Amélie dans ce Patrick, et beaucoup de Patrick aussi en Amélie. Le père s’exprime par le biais de la plume talentueuse de sa fille. Et cette dernière fait preuve de facéties que l’on devine toutes paternelles. Pas de mystification, de conte de fée (même si Shéhérazade est mentionnée…) ou d’historiette abracadabrantesque ici, mais beaucoup de délicatesse et de tendresse. Et au final, un Nothomb lu et adoré !

dimanche 29 août 2021

Malédiction, Tome 3 : L’apocalypse de Rosalie, Cécilia Armand (Elixyria, 02/2021)

 



Malédiction, Tome 3 : L’apocalypse de Rosalie, Cécilia Armand (Elixyria, 02/2021)

💔💔💔 

Troisième et dernier tome de cette saga qui réinvente les codes du Paradis et de l’Enfer tels qu’on les enseigne au catéchisme ! Elle en a fait du chemin, la jeune Rosalie, victime d’un accident sur Terre qui l’a propulsée dans un autre univers ! Après être tombée dans les bras d’un ange déchu, voilà notre jolie héroïne qui se sent attirée par le maître des Enfers… Mais face à un équilibre menacé sur Terre et dans le Ciel, Rosalie va devoir faire des choix.

 

« Dominer ne m'intéresse pas, je me contente d'essayer de survivre dans le marasme de mes tourments. J'ai beau vivre depuis des millénaires, je ne sais toujours pas où est ma place. » Azraël est lui aussi est en pleine tourmente existentielle ; entre ses amours d’antan et la jolie Rosalie, il ne sait plus où il en est. Exclu du Paradis, il se sait attiré par le Mal, mais là aussi, son cœur et son âme balancent…

 

« J'aurais pu adorer ce spectacle, j'aurais même applaudi pour le style plutôt poétique de cette vision, si ma compagne n'était pas l'objet de la représentation. » Lucifer se satisfait des scènes de torture et de violence. En tant que Maître des Enfers, il représente le Mal absolu. Mais le voilà qui tombe amoureux pour la première fois de sa longue vie. Ces doux sentiments ne vont- ils pas venir amoindrir son pouvoir ?

 

« La pestilence est partout, les gens périssent de faim, d'autres de maladie. Certains ont été écartelés, torturés, comme dans les temps anciens. » Les Cavaliers de l’Apocalypse sont descendus sur Terre pour tout exterminer. Rosalie et les deux hommes de sa nouvelle vie céleste vont devoir réagir en bonne intelligence afin de conserver le monde tel qu’ils le connaissent, avec son lot d’amour et de haine. Dure gageure !

 

Au final, un troisième tome agréable à lire : les actions s’enchainent à un bon rythme et les personnages sont malmenés à souhait ! Par contre, j’ai moins aimé la deuxième partie du roman dans laquelle les personnages sont davantage dans l’introspection. J’ai aussi été agacée par certaines coquilles dans le texte, c’est dommage. Dans l’ensemble, c’est tout de même une très bonne saga que je recommanderai volontiers aux fans de fantasy ou de bit- lit !

mercredi 25 août 2021

L’Evasion d’Arsène Lupin, Maurice Leblanc (édition présentée: Belin, 07/1905 pour la première publication)


 

L’Evasion d’Arsène Lupin, Maurice Leblanc (édition présentée: Belin, 07/1905 pour la première publication)

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Arsène Lupin est devenu un personnage à la mode depuis le début de cette année. En quelle raison ? La société américaine spécialisée dans la distribution et l’exploitation d’œuvres cinématographiques et télévisuelles qu’est Netflix a décidé de s’inspirer de l’univers créé par Maurice Leblanc pour en faire une série, « Lupin ; Dans l’ombre d’Arsène ». Le succès est immédiat, au point de classer la série dans le top 10 des contenus les plus regardés au monde (source : Wikipédia). Le moment était donc venu pour moi de me replonger dans les aventures de ce mystérieux cambrioleur, lues alors que j’étais adolescente.

 

« - C'est bien ici la prison de la Santé ?
- Oui.
- Je désirerais regagner ma cellule. La voiture m'a laissé en route, et je ne voudrais pas abuser. »

Arsène Lupin est enfermé dans une cellule de la prison de la Santé, attendant son jugement : il a été arrêté pour divers vols et détournements d’identité. Mais voilà que notre fanfaron parvient à informer les journaux à scandale de son envie d’évasion juste avant que ne se tienne le procès. Pour montrer aux policiers parisiens et au célèbre Ganimard, son célèbre adversaire, qu’il y parviendra, il réalise un premier essai, réussi, puis réintègre la prison de son plein gré, à la barbe du monde judiciaire.

 

« Des cris, des rires, des exclamations partaient de tous côtés dans la salle qu'agitait ce coup de théâtre inattendu.
Le président fit mander le juge d'instruction, le directeur de la Santé, les gardiens, et suspendit l'audience. »

Deux mois plus tard, le procès a bel et bien lieu ; Lupin est présent… En apparence. Car après moult questions, il semblerait que le coupable présenté devant le tribunal soit en fait un certain Désiré Baudru…

 

Au final, un très bon moment de lecture grâce à des répliques truculentes et une langue juste et élaborée. Le récit est court et j’aurais apprécié davantage de profondeur pour expliquer certaines situations, mais cela va certainement me conduire à relire d’autres aventures de ce coquin de Lupin !

mardi 24 août 2021

Une soupe à la grenade, Marsha Mehran (Picquier, 08/2021)


 

Une soupe à la grenade, Marsha Mehran (Picquier, 08/2021)

💕💕💕💕💕

Ce roman est une véritable friandise que j’ai pris grand plaisir à savourer ! Les couleurs vives de la couverture et la grenade du titre sont déjà une invitation à la gourmandise, mais c’est la plume de l’auteure qui s’est révélée être un pur régal. Pourtant, le destin de nos trois héroïnes, des sœurs ayant fui l’Iran au moment de la révolution islamiste, n’a rien eu de joyeux au départ, et les trois jeunes femmes comptent sur leur exil dans le petit village irlandais de Ballinocroagh pour enfin trouver le bonheur et la sérénité.

 

« C'était drôle qu'elle se souvienne de les avoir entendus avant même de les voir, les teintes funèbres de cette tente pour femme qui allait par la suite devenir si courante, même dans les banlieues plus aisées du nord de la capitale. Tchador, tchador. » Ces phrases résonnent terriblement avec l’actualité. Une part de ce récit est éminemment autobiographique et on retrouve un peu de Marsha Mehran dans chacune de ces trois sœurs. Bouleversant.

 

« Bahar et Layla mirent de côté leurs pensées pour examiner le fantastique butin de goûts et de couleurs autour d'elles. La nourriture délicieuse et les pièces douillettes témoignaient vraiment de leurs efforts, un grand exploit réalisé en quelques jours à peine.
Oui, elles avaient fait du chemin. Un long chemin, vraiment. »
Si Marjan est aux fourneaux avec talent, Bahar et Layla sont une aide indispensable au bon fonctionnement du Babylon Café. Les effluves épicés se dégageant de l’établissement vont d’abord dérouter les habitants très conservateurs de Ballinocroagh. Mais ceux qui vont oser en franchir la porte vont rapidement louer les arômes dégagés en bouche par la cuisine iranienne. Le succès naissant du café ne va pas plaire à tous…

« Le maussade baron de la bière grogna et cracha sur le trottoir craquelé au pied de la porte rouge de la boutique. C'était de la sorcellerie pure et simple, point barre. Aucun doute là- dessus. » Thomas McGuire est le patron de plusieurs restaurants et hôtels dans les environs. Il ne va pas supporter que des étrangères viennent piétiner ses plate- bandes… Sa colère va hanter le village.

 

« Le Babylon Café. Les jardins suspendus de Babylone. Cette rangée de devantures, songea-t-elle, ce Main Mall, était désormais leur jardin suspendu, leur petit coin de paradis. » Le parcours de ces trois filles, tellement éprouvant, est délivré au compte- gouttes ; une façon de procéder très pertinente puisqu’il est distillé en parallèle de l’installation de ces Iraniennes, et conduit le lecteur à se sentir solidaire avec leurs déboires, mais également heureux lorsqu’elles réussissent. Bref, des vagues d’émotions diverses m’ont animée durant cette lecture, amplifiée par une plume habile, qui adapte son registre à chaque chapitre, selon le personnage qui y sera abordé. Les recettes qui ponctuent le livre donneront envie à ceux qui aiment cuisiner de les tester. Quel dommage que cette auteure talentueuse ait mystérieusement disparu… A lire absolument !

mercredi 18 août 2021

Dullahan, Marine Kelada (Auto- édition, 06/2021)


 

Dullahan, Marine Kelada (Auto- édition, 06/2021)

💓💓💓💓 

Le Dullahan est une créature mythologique irlandaise. Il s’agit d’un personnage sans tête, chevauchant un étalon noir avec qui il partage la faculté de voir. Ce cavalier est par ailleurs équipé d’une épée et d’un fouet constitué des os tirés de la colonne vertébrale d’un humain (Beurk !). Autant vous dire qu’il ne fait pas bon le croiser lors d’une randonnée nocturne en pleine campagne irlandaise… C’est pourtant ce qui va arriver à la jeune Mila, 17 ans, partie camper dans la forêt avec ses quatre amis…

 

« Rien ne sert de courir,
Tu vas mourir,
Car le Dullahan arrive !
 » Rien ne prédisposait notre petit groupe de jeunes à vivre une tragédie. Les vacances se terminent, ils font griller des chamallows au- dessus du feu tout en se racontant des histoires à faire peur et en chantant des comptines folkloriques. Et pourtant, Mila, en s’écartant du campement va être enlevée, sur le dos d’un ténébreux destrier, et emmenée dans un château bloqué dans le temps à l’année 1601.

 

« Seul un être humain, avec l'aide de notre magie, pourra accéder aux visions du passé et reconstituer le puzzle de la fin du Dullahan. Et même si nous savions ce qui est arrivé, la vérité doit lui venir d'un humain pour briser la malédiction. » La jeune fille va se retrouver emprisonnée dans le château, prise au piège par quelques anciens domestiques du seigneur O’Siorai, qui vont la forcer à vivre comme une milady du XVIIème siècle. Si elle accepte de se plier à leurs rites magiques, alors elle pourra retrouver sa liberté d’adolescente du XXIème siècle. Mais sera-t-elle capable de remonter aux origines de la légende afin de dénouer la malédiction macabre qui a engendré le Dullahan ?

 

Voilà un récit qui m’a emportée dès les premières pages. Les chapitres sont courts, les actions défilent, la plume est déliée et un certain suspens pousse à la lecture de la suite. J’ai vraiment bien aimé cette histoire du cavalier sans tête abordée sous un double angle temporel, et faire des bonds entre le XVIe et le XXIe afin de faire avancer la double intrigue. Car oui, il y en a deux : la recherche des origines de la malédiction, mais aussi une romance assez inattendue !

J’avoue avoir eu quelques interrogations sur certains agissements des personnages satellites, mais dans l’ensemble, j’ai passé un excellent moment de lecture. Auteure à suivre !

lundi 16 août 2021

Malédiction, tome 2: Le requiem de Lucifer, Cécilia Armand (Elixyria, 10/20)



 Malédiction, tome 2: Le requiem de Lucifer, Cécilia Armand (Elixyria, 10/20)

💓💓💓💓

Dans ce tome 2, nous retrouvons nos « Humains » du précédent opus de la trilogie, Rosalie et Tristan. Mais attention, nous ne sommes plus sur Terre, mais bel et bien en Enfer ! En effet, Azraël s’est réfugié dans l’Entre- deux, persuadé d’être un être d’une noirceur absolue, mais Rosalie, totalement éprise de lui, va tout faire pour le ramener auprès d’elle ; quitte à s’allier avec Lucifer….

 

« Je tue des gens, je prends des âmes, je me délecte de la souffrance en corrompant les humains et j'aime respirer l'odeur du sang. » Lucifer est un homme charismatique, vu de l’extérieur, mais c’est un être intrinsèquement maléfique, qui se repait de la souffrance des autres. Les démons qui se trouvent à son service sont tous vils et mesquins. Et pourtant, Rosalie va se sentir attirée par le maître des Enfers. Et le fait qu’Azraël l’ait abandonnée pour laisser s’exprimer sa part ténébreuse, et se venger, au risque de déclencher un chaos apocalyptique sur Terre, va entraîner notre jeune héroïne sur la voie des doutes, au niveau sentimental. D’autant plus que Lucifer va rapidement lui montrer qu’elle ne le laisse pas indifférent. Mais voilà, leur attirance mutuelle risque de déclencher des foudres supplémentaires !

 

« Un massacre ! Voilà à quoi ressemble ce combat dans le désert en cette nuit tachée de sang et de honte. » Les ennemis, qu’ils soient récents ou séculaires, vont s’affronter, au cœur du récit, avec violence ; anges et démons s’en donnent à cœur joie, mutilent, sacrifient, torturent à tours de bras. Les chevaliers de l’Apocalypse (Pestilence, Famine, Conquête et Guerre) sont, eux, prêts à intervenir et à tout dévaster. Bref, ça sent le roussi !

 

 Au final, un tome 2 très bien écrit, richement documenté au niveau des personnages légendaires bibliques. Les citations qui ouvrent chaque chapitre sont enrichissantes. Le récit polyphonique est d’ailleurs surprenant par son approche des mythes de la Création ! Judas, Caïn, et Méphistophélès viennent ainsi se mêler à l’intrigue, aux côtés de Rosalie, pour le meilleur comme pour le pire, mais toujours de manière cohérente ! Et la fin ne donne qu’une envie : lire la suite !!!

mardi 10 août 2021

Acouphanges, Lou Valérie Vernet (M+ Editions, 08/2021)

 


Acouphanges, Lou Valérie Vernet (M+ Editions, 08/2021)

 💛

Un drôle de titre pour ce récit qui m’a poussée à chercher ce qu’étaient des « acouphanges » sur le net. Je n’ai pas trouvé grand-chose, si ce n’est découvert l’existence d’un « Oracle des Acouphanges » (publié en 2015), permettant à celui qui s’en sert d’obtenir des messages divinatoires par le biais de petits anges chuchoteurs… Et effectivement, Lou Valérie Vernet fait évoluer ses personnages dans un univers ésotérique, dans lequel les chakras, les Lois de l’univers, les accords toltèques et les égrégores régissent la vie des personnages.

 

« Un homme, ce n'est pas différent d'une bête. Quand ça meurt, l'âme s'enfuit. Tout de suite. » Anne Manon, Nathalie Borde, qui s’est renommée Athéna, a treize ans lorsqu’elle est retrouvée à côté du cadavre de son père. Cela fait trois jours qu’elle est prostrée, sans boire, ni manger, attendant de voir l’âme de son père quitter son enveloppe terrestre.

 

« Procédure tout à fait salvatrice pour reprendre pied et sortir enfin d'une espèce d'apathie consternante. Un ballet orchestré à la perfection dès lors que l'adolescente s'est dépliée spontanément. L'instant d'avant elle n'en finissait pas de se recroqueviller, celui d'après elle se dénouait. » Il faudra l’arrivée de la Police pour que l’adolescente quitte enfin sa prostration et accepte d’être prise en charge. Est- elle innocente ou coupable ? Sensée ou démente ? Athéna s’enfuit, quittant le Roussillon pour Paris, avec un parcours ponctué d’incidents atypiques.

 

Au final, un livre – je n’arrive pas à utiliser le terme de « roman » pour cet écrit – qui ne m’a pas emballée du tout. Si au début, j’avoue que ma curiosité a été attirée par le cadre du crime et les débuts de l’enquête, je me suis rapidement sentie perdue dans un univers trop rocambolesque pour moi, à la limite du charabia. Je n’ai en effet pas compris grand-chose à ce qui se tramait dans la tête d’Athéna, ni autour d’elle. Trop abstrait, trop de références ésotériques que je ne maîtrise pas, des scènes qui m’ont semblé incohérentes… Selon sa classification des êtres humains, je dois probablement être 1D ou 2D ; pas très futée ! Bref, un livre qui n’est pas pour moi (ou un mauvais karma ?!).  

lundi 9 août 2021

Revivre… enfin, Peggy L.S. (Elixyria, Août 2020)


 

Revivre… enfin, Peggy L.S. (Elixyria, Août 2020)

💙💙💙💙💙

 Avant de vous plonger dans la lecture de son roman, l’auteure a voulu s’adresser à ses lectrices dans une note : « Ne soyez pas qu’une victime, battez- vous, confiez- vous, décidez de revivre. » Ce message fort rappelle que toutes les trois minutes, quatre femmes sont victimes de sévices corporels, mais également que moins de 40% de ces femmes demanderont de l’aide, et que moins de 10% feront appel à la Police.

 

« "Sont- ils encore là ?" Un frisson d'épouvante se propage le long de ma chair si meurtrie. J'aimerais mieux mourir que subir à nouveau ce qu'ils m'ont infligé. » Jennifer a dix- sept ans. Elle vient de subir une agression sexuelle très violente de la part de quatre hommes dans une cave de son immeuble. Laissée exsangue sur le bitume, et dans l’impossibilité de se confier, la jeune femme ne se remettra pas de ce qui lui a été infligé. Les blessures physiques, elles, vont s’estomper au fil des ans mais au niveau psychique, Jennifer va développer un trouble nommé androphobie : elle ne supporte plus les hommes. 

 

« Je n'étais qu'un concentré de haine bouillonnante tel un volcan en éruption. Je ne pouvais plus me regarder dans un miroir, sourire à ma famille, être touchée ou même parler au personnel mâle. » Six années ont passé et Jennifer quitte la Corse pour s’installer à New York. Elle y trouve un travail en tant que serveuse au Mily’s Bar, lieu où elle rencontre celle qui deviendra sa meilleure amie, Juliet. Jusqu’au jour où un client va se montrer trop entreprenant…

 

« Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive, encore moins pourquoi elle me résiste tant. Je peux pourtant avoir toutes les nanas que je veux, mais non, c'est elle qui m'intéresse pour le moment. Peut- être justement parce que je ne peux pas l'avoir. » Par le fait du hasard, Jennifer va rencontrer Adam Jones, le propriétaire de quatre établissements de luxe. Un homme aussi séduisant qu’arrogant qui va, sans qu’elle le sache dans l’immédiat, devenir son nouveau patron. Pour ce coureur de jupon, l’attirance envers Jen est immédiate, mais le chemin de la séduction va s’avérer, lui, bien plus long.

 

Au final, j’ai été captivée par ce récit du début à la fin. L’auteure, grâce à une narration alternée entre Jen et Adam, donne accès aux émotions de ses personnages. Ces derniers sont vraiment attachants, que ce soit notre couple ou les amis qui gravitent autour d’eux. Elle met dans les liens qui les unissent une empathie remarquable et, de ce fait, j’ai trouvé que le cheminement psychologique de Jen était parfaitement crédible. Un roman d’amour, d’amitié aussi, mais surtout, de résilience. 

dimanche 8 août 2021

Quand les hasards sont des rendez- vous, Magali Discours (L'Archipel, 06/21)

 


Quand les hasards sont des rendez- vous, Magali Discours (L'Archipel, 06/21)

💛💛💛

 

Voilà un petit roman (220 pages) parfait pour les vacances ; une bande d’amis artistes, une double temporalité, des allers- retours pour Nice, et des histoires d’amour saupoudrées de chansons nostalgiques… Le fond de l’intrigue est d’ailleurs basé sur les souvenirs ; des habitués d’un bar, encore étudiants, vont rendre hommage au Papé, le sans- abri que Jocelyne, la patronne du café, avait pris sous son aile.

 

« Nos rêves de comédies, ainsi que notre passion commune pour la bière et les cacahuètes, nous avaient réunis au Bar du coin où nous épuisions nos dernières heures adolescentes à refaire le monde, avant le grand saut, les folles amours, les beaux espoirs, les chagrins et les bonheurs de nos futures vies d'adulte. » Lisa sera la narratrice des épisodes ancrés dans les années 2000. Cette jeune artiste représentera la touche de fraicheur du récit, avec son émerveillement de « petite jeune », et son premier « grand amour » qui fera écho aux histoires de cœur du Papé. C’est elle qui nous raconte la manière dont ses amis vont rendre un hommage bien particulier au Papé, le faisant revivre momentanément par le biais de valises remplies de souvenirs exposées lors de festivals de rue aux quatre coins de France.

 

« Comme c'est impudique la mort ! Elle ouvre grand les portes et les tiroirs à ceux qui restent. Ils peuvent venir y fouiller à leur guise. » Les valises exposées sont autant de chapitres ouverts sur les étapes de la vie du Papé. Un concept original qui attire les curieux.

 

« Florence y croyait dur comme fer à cette promesse de Paul Eluard : "Il n'y a pas de hasards, il n'y a que des rendez- vous." » Octobre 2005. Festival du théâtre de rue à Dijon. Le ciel est menaçant mais il n’empêchera pas Florence, dynamique quadragénaire, d’aller à la rencontre des artistes. En découvrant l’histoire du Papé à travers ses valises de souvenirs, c’est le destin qui va lui donner rendez- vous.

 

Au final, un roman très agréable à lire. Les voyages dans les souvenirs du Papé sont autant de petites séquences narratives très intéressantes. J’ai un peu moins adhéré au reste, à l’histoire de la bande de jeunes qui m’a parue trop survolée pour que j’y adhère. Une jolie lecture d’été néanmoins.

jeudi 5 août 2021

Illusions paradoxales, François Avisse (M+ Editions, 06/2021)


 

Illusions paradoxales, François Avisse (M+ Editions, 06/2021)

💓💓💓💓💓 

François Avisse a une fois de plus fait mouche avec ma curiosité de lectrice, au point de me tenir éveillée jusqu’à pas d’heure pour avoir le fin mot de son histoire ! Cela avait déjà été le cas avec son précédent roman, « La malédiction du 5e Dieu ». J’ai adoré ici sa mise en œuvre personnelle de cette catégorie de roman policier qu’est le « mystère en chambre close ».

 

« C'est bizarre... Mais il y a encore plus curieux : on est bien d'accord que cet homme s'était enfermé dans ses toilettes, j'ai même dû me servir d'un pied de biche pour ouvrir. Alors comment l'assassin a- t- il pu y pénétrer, tuer son occupant de trois façons différentes et en ressortir sans toucher au verrou ? » Le roman s’ouvre sur une scène du quotidien, celui des Williams, des retraités, qui regardent un jeu télévisé de questions- réponses. Monsieur profite de la coupure publicitaire pour se rendre aux toilettes, comme il en a pris, depuis longtemps, l’habitude. Mais voilà, il n’en ressort pas. Une heure plus tard, Madame s’inquiète.

 

« Dog se retourne et voit arriver Liam. Avec ses lunettes de soleil de travers, ses habits plus froissés encore que la veille et son teint blafard, on le croirait tout juste sorti de la série "Walking Dead" - côté zombie évidemment. » La Police arrive rapidement sur les lieux. Mais dépassés par les événements, les enquêteurs font appel à un ancien flic, Liam. Voilà un an qu’il a démissionné et qu’il passe ses journées à se saouler. On apprend très vite pourquoi. Et ce flic- là, c’est un as dans la résolution d’énigmes plus complexes les unes que les autres. Ce qui apparaît alors comme un remake sanglant du jeu « Cluedo » à résoudre va peut- être l’aider à sortir de ses impasses…

 

Vous l’aurez compris, François Avisse m’a scotchée à son livre ; pressée de comprendre le pourquoi du comment de ces crimes, de ces indices, de ces énigmes frôlant le surnaturel. J’ai adoré la plume aux accents sarcastiques, et j’ai d’ailleurs souri autant que j’ai frissonné ! J’aime beaucoup être entraînée et surprise de la sorte ! Vivement le prochain !

mercredi 4 août 2021

Captive de sang, Stéphanie Roselière (Elixyria, 07/2021)


 

Captive de sang, Stéphanie Roselière (Elixyria, 07/2021)

💙💙💙💙


Ah, ce qu’ils en ont fait couler du sang, heu, de l’encre, les vampires !!! Depuis le XVIIème siècle, les écrivains y trempent régulièrement leur plume et aujourd’hui encore, les romans qui mettent en scène nos suceurs de sang pullulent sur les tables de nos libraires, que ce soit en version « soft » pour les enfants ou en version « gore » pour les plus grands. Stéphanie Roselière s’est emparé du mythe aux longues dents en le modernisant à sa manière, pour en faire des personnages modernes, vivant au XXIème siècle.

 

« Le titre trônait au milieu de son écran : "De la formation des mythes vampiriques traversant les âges à l'émergence d'un mouvement s'ancrant dans l'économie capitaliste moderne." » Sénaé, 22 ans, est étudiante en sociologie. En fin de cursus, elle s’apprête à rendre son mémoire, qui a justement le personnage du vampire pour sujet. Un poste de pigiste pour un magazine de société l’attend déjà. Pour elle, aucun doute, les monstres de la nuit appartiennent au folklore…

 

« La jeune fille était persuadée que chaque légende contenait toujours un fond de vérité faisant référence à des éléments simples du quotidien ; le bouche- à- oreille et le pouvoir des croyances populaires faisaient ensuite le reste. » Ses certitudes permettent à Sénaé de se promener seule une fois la nuit tombée, pour aller faire la fête avec ses amies. Et pourtant, un soir, la voilà en prise avec un groupe de garçons. Une morsure. Un enlèvement. Un clan de buveurs de sang. Persuadée d’être retenue prisonnière d’un groupe d’hallucinés, Sénaé affronte leur chef tyrannique, Victor, sans aucun état d’âme. Mais au fur et à mesure de ces confrontations, voilà que la jeune femme se sent de plus en plus attirée par celui qui se présente comme un vampire centenaire, détenteur de l’un des trois trônes d’un cercle vampirique nommé « L’Alliance ».

 

« Les interrogations se bousculaient dans sa tête comme elle le regardait d'un œil neuf. Le monde qu'elle pensait connaître n'existait plus, ses repères avaient disparu. » Sénaé va devoir se faire une raison : le folklore a rejoint la réalité, et elle en est partie prenante, désormais…

 

J’ai été complètement emportée par ce récit, cet univers créé de toutes pièces sur un mythe séculaire réactualisé. Les personnages sont psychologiquement bien construits ; et si j’ai cru au premier abord lire une romance, j’ai été agréablement surprise de constater que l’histoire d’amour était complètement secondaire, supplantée par une intrigue complotiste, qui donne d’ailleurs lieu à des scènes dignes d’un thriller. Seul bémol : j’aurais préféré un récit à la première personne, avec Sénaé en tant que narratrice, pour ressentir davantage d’émotions et mieux comprendre certaines de ses réactions. Mais c’est dans l’ensemble un très bon roman, riche, qui se dévore grâce à l’écriture fluide de cette jeune auteure, et que je ne peux que recommander à tous les amateurs de Fantasy.