samedi 27 février 2021

Le Lion et le Corbeau, (MxM Bookmark, RB, 2018)

 


Le Lion et le Corbeau, (MxM Bookmark, RB, 2018)

💜💜💜💜💜 

J’ai été attirée par ce titre me rappelant les Fables de La Fontaine et j’ai pris énormément de plaisir à lire cette romance MM située dans l’Angleterre du XIVe siècle ! Que d’intrigues, de questionnements et de rebondissements ! Et quel plaisir de lire des phrases qui vous emportent directement au Moyen Âge grâce au lexique et à la syntaxe utilisés !

 

Angleterre, l’an 1300, Sir William Corbett, grand et puissant guerrier, surnommé Le Lion, vient participer aux joutes organisées par le Seigneur Brandon pour se faire remarquer : il souhaite avant tout plaider la détresse de sa sœur, Elaine, mariée à un véritable tyran domestique qui la bat à tout va. Et il a besoin de chevaliers pour le seconder dans sa mission.

Mais son regard va croiser celui du cadet des Brandon, Christian : « Ce jeune chevalier était pour sûr un plaisir de ces dames. Il avait une beauté que William n'avait jamais contemplée chez aucun homme. Et à dire vrai, chez aucune femme non plus. »

 

L’attirance, immédiate, se révèle réciproque. Et Christian va proposer son aide à William, bravant les décisions de son propre père. Le Lion ne pourra alors pas la refuser. « Dès que Christian avait obtenu ses éperons, il était devenu chevalier, et en tant que tel, il devait allégeance à son père.
Entre ceux qui le voulaient dans leurs lits, ceux qui le voulaient comme époux et ceux qui le voulaient mort, le château se trouvait être un lieu bien plus dangereux que n'importe quel champ de bataille. »
Ce qui pousse le jeune Brandon à fuir le château familial, c’est son sentiment de ne pas être comme ses frères, êtres sanguins, misogynes et tyranniques, à l’image de leur père. Lui, si délicat et doux, est la cible constante d’actes de malveillance. Partir est devenu un impératif de survie, et suivre Le Lion est une opportunité à saisir.

 

Les longues semaines de leur périple vers le domaine du Seigneur Somerfield, le mari d’Elaine, vont être l’occasion pour nos deux chevaliers d’éprouver le respect des valeurs qui les ont bercés depuis leur enfance. La confrontation entre les mœurs inculquées et les sentiments qu’ils ressentent tous deux va les mettre à rude épreuve…

 

Au final, un récit très bien écrit que j’ai lu d’une traite totalement immergée dans l’ambiance du Moyen Âge, ses odeurs, ses règlements de comptes aléatoires et ses us et coutumes incompréhensibles et qui semblent au premier abord tellement désuets, mais qui, quand on y pense, ne le sont pas tant que ça, hélas, au XXIe siècle.

vendredi 26 février 2021

La rue qui nous sépare, Célia Samba (Hachette, 01/2021)


 

La rue qui nous sépare, Célia Samba (Hachette, 01/2021)

💙💙💙💙 

Célia Samba signe là un joli premier roman ; un récit sensible sur un sujet que l’on commence à voir dans la littérature contemporaine : le sort des sans domicile fixe. On y sent quelques touches autobiographiques dans la jeunesse de Mia, l’héroïne principale, son statut d’étudiante et son empathie pour qui souffre d’une forme de rejet quelconque. Sa prise de conscience de la grande détresse des sans- abris est expliquée dans les notes à la fin de l’œuvre. Inventer une histoire d’amour entre une étudiante et un jeune homme qui vit dans la rue est devenu, on le comprend vite, une évidence pour elle.

 

« Chaque jour, en rentrant des cours, elle traversait la rue pour le croiser. Lorsqu'elle arrivait à sa hauteur, il la saluait dans un murmure ; parfois, ses lèvres s'étiraient furtivement, le temps d'éclairer les traits tirés de son visage. Elle ralentissait l'allure, fossettes aux coins des lèvres. Sa gêne se mêlait au désir de lui parler, nouait son ventre. Les secondes lui semblaient s'allonger quand il la regardait. Mais que dire ? » Un jour d’hiver, le regard de Mia rencontre celui de Tristan. Il fait froid, elle vient de s’acheter une crêpe chaude qu’elle s’apprête à savourer. Lui fait la manche, assis sur le trottoir froid. Et si elle lui donnait sa crêpe ? Non, elle n’ose pas. Son geste avorté va la tourmenter et la pousser à vouloir aider le jeune homme, à tenter de connaître son histoire et les raisons qui l’ont poussé à la rue…

 

« C'était un de ces matins où Tristan ne voulait pas ouvrir les yeux. L'air glacial empestait la pisse et le tabac froid, mais, caché dans le noir de ses paupières closes, il pouvait s'imaginer ailleurs que dans le squat miteux où il avait passé la nuit. L'obscurité lui faisait miroiter les délices d'une autre vie... » Les deux jeunes gens s’apprivoisent doucement, se cherchent, nouent un lien amical prêt à tout moment à basculer en histoire d’amour, mais les préjugés, le regard des autres vont entraîner un sentiment de honte partagée, des évitements, des rendez- vous loupés. Tristan saura- t- il accepter le regard des cousins de Mia ? Celle- ci saura-t-elle faire entrer le jeune homme officiellement dans sa vie, au mépris des « convenances » ?

 

Ce roman « young adult » se lit facilement même lorsqu’on a l’âge d’être les parents des protagonistes. C’est un récit plein d’empathie qui nous rend les personnages très sympathiques, tout en pointant du doigt notre égocentrisme. Qui parmi nous s’intéresse au sort des SDF qui mendient devant la porte de leur boulangerie ? C’est un roman qui m’a bien évidemment fait réfléchir. Et personnellement, j’aurais préféré que l’auteure ne nous propose pas de fin alternative toute douce,  pour laisser son lecteur sur un goût bien amer en bouche. Si je devais le relire, j’ignorerais la quatrième partie…

jeudi 25 février 2021

Main de fer et gant de velours, Agents virtuelles T.3, Virginie Platel (MxM Bookmark, 02/2021)



 Main de fer et gant de velours, Agents virtuelles T.3, Virginie Platel (MxM Bookmark, 02/2021)

💙💙

 J’ai lu ce tome 3 de la saga « Agents virtuelles » sans avoir lu les précédents. Cela ne m’a pas empêchée d’apprécier les deux héroïnes, Elfi, la douce blonde et Ines, la brune musclée. J’ai vite compris que le lien qui les unissait était plus que professionnel ou amical et cette relation apporte une touche de sensibilité très appréciable dans ce récit teinté d’aventure !

 

L’auteure en effet nous projette dans un univers « rétrofuturiste » à la Jules Verne, celui du Steam punk, qui puise ses idées oniriques dans l’époque victorienne alors que la société était en plein essor industriel. Cet univers, c’est celui qu’affectionne Sir Lionel Vernet, un milliardaire qui a construit sa fortune en tant que concepteur de jeux vidéo. Sauf que ce dernier se fait assassiner lors d’une soirée qu’il a lui – même organisée.

 

« Vous allez participer à la soirée qui a précédé le drame, reconstituée grâce aux souvenirs du comte. Soirée durant laquelle vous incarnerez l'une des invitées présentes, et ce, sous votre nom véritable. Vous aurez alors à identifier plusieurs suspects potentiels, confondre un coupable éventuel et, en définitive, élucider l'énigme entourant la mort de Lionel Verney. » Nos deux jeunes femmes sont des agents dépêchés par l’agence Athanor, spécialisée dans l’utilisation de technologies avant – gardistes et défiant l’entendement pour braver les barrières spatio- temporelles de notre réalité et résoudre des enquêtes du passé.

 

« Elfi savait toutefois très bien que lorsqu’une femme vous confiait ses secrets intimes, c’était souvent avec l’intention qu’ils reviennent dans la face de celui qui lui avait fait du mal, à la manière d’un boomerang. » Les femmes se mesurent et s’affrontent autour du milliardaire. Elfi et Inès aussi, toujours à l’étape si touchante de la séduction dans leur propre couple…

 

Et pourtant, autant je me suis attachée aux deux héroïnes, autant j’ai adhéré à l’intelligence de la plume élégante de l’auteure, tout autant je n’ai pas réussi à me captiver pour le récit. Que m’a-t-il manqué ? J’avoue aimer que le décor soit posé dès le départ, et l’apparition régulière d’automates, d’avatars ou d’animaux étranges a entraîné chez moi une espèce de confusion mentale, propice à un décrochage immédiat…  

mardi 23 février 2021

Les yeux d’Ava, Wendall Utroi (Le Livre de poche, 09/2020)


 

Les yeux d’Ava, Wendall Utroi (Le Livre de poche, 09/2020)

💓💓💓💓💓

Je referme à peine ce roman et me pose encore une fois cette question : pourquoi est-il classé dans la catégorie « thriller » ? Pour moi, ce serait, certes un roman noir, mais avant tout un roman « de vie ». Même si c’est un peu étrange de dire cela tant la mort y est présente. Et pourtant…

 

« La vie, cette garce, cette grande manipulatrice, nous trimballe sur ses chemins tortueux, semés d'embûches, de carrefours, de voies sans issue, de rencontres, de ravins et de montagnes infranchissables, et tranquillement elle nous mène, quels que soient nos choix, vers ce bout du parcours qui s'ouvre toujours sur la même porte. » Le parcours d’Ava est incroyablement émouvant. L’auteur est très fort car son empathie envers son personnage principal permet au lecteur de se glisser dans la peau de celle- ci. Ava, est une jeune trentenaire heureuse : elle ne regrette pas d’avoir tourné le dos à ses parents et abandonné ses études pour épouser Léo, son amour de jeunesse. Ensemble, ils ont eu des jumeaux, Rose et Thomas, dont Ava s’occupe, ravie de cette vie paisible et douce.

 

Mais voilà qu’un terrible accident de voiture, survenu sur la route des vacances, va projeter Ava dans une suite d’événements tragiques : « Ma vie depuis cet accident était devenue un enfer où le malheur se repaissait de chaque minute et m'arrachait même les joies les plus fugaces. » Le deuil, la trahison, la ruine… Le destin semble s’acharner sur Ava avec une obstination rare, au point de la faire tomber plus bas que terre…

 

Dans la page des remerciements, l’auteur explique avoir voulu « pointer du doigt l’incroyable fragilité de nos vies », et il le fait avec brio ! J’ai été captivée par l’histoire malheureuse d’Ava ; certains passages m’ont tordu les tripes. Paradoxalement, Wendall Utroi nous rappelle, en filigrane, qu’il est bon de savourer des bonheurs simples ; au risque de les voir un jour s’échapper…Un auteur à découvrir, indubitablement !

vendredi 19 février 2021

Hate to love you, Emma Berthet (Elixyria, 02/2021)


 

Hate to love you, Emma Berthet (Elixyria, 02/2021)

💗💗💗💗💗

 Une romance qui commence très fort et de manière inattendue puisque la demoiselle assène une gifle retentissante au protagoniste masculin de l’histoire à la quinzième page ! Cela se passe dans un bar dans lequel Aria est serveuse, un soir où Allan Carter, une star locale du hockey sur glace, est venu boire une bière. La serveuse, va se faire licencier aussi sec par son patron…

Pourquoi tant de violence ? La faute aux non- dits du passé, trop nombreux, et aux rêves brisés. « L'impression de la connaître est persistante, les détails sont subtils, je n'ai pas une vision d'ensemble de cette femme, mais de petites choses me la rendent familière. » Si Aria a immédiatement reconnu Allan, ce dernier ne parvient pas, lui, à retrouver l’identité exacte de la serveuse. Et pourtant…

Aria était une danseuse de ballet prometteuse, liée autrefois à la famille Carter. Elle était à deux doigts d’entamer une carrière professionnelle couronnée de succès. Mais le destin en a voulu autrement. La voilà maman d’un petit garçon de quatre ans, Liam, qu’elle chérit plus que tout au monde : « Liam me tape dans la main avant de se jeter dans les bras de sa mère. Il lui barbouille le visage de bisous pendant qu'elle éclate de rire. Cette scène est surréaliste, débordante d'amour et de complicité. Ces deux- là donneraient envie à n'importe qui d'avoir un enfant. »

Au fur et à mesure des pages, on se demande ce qui a bien pu arriver à Aria pour qu’elle déteste à ce point la famille Carter, et les réponses arrivent au compte- goutte. Allan, lui, est indéniablement attiré par l’ancienne danseuse de ballet, et le fait qu’il se mette à entraîner le petit Liam au Hockey sur glace va lui permettre de se rapprocher de la belle brune… tout en découvrant la face cachée et machiavélique des membres de sa propre famille.

Au final, une romance captivante, qui multiplie les rebondissements et les révélations. Nos deux protagonistes sont attirés l’un par l’autre comme mus par une force invisible et j’ai vraiment eu envie que ça marche entre eux après avoir découvert les malheurs qu’ils ont subis dans le passé. J’ai aussi énormément apprécié que l’autisme soit partie prenante de l’histoire avec tant de délicatesse. Une romance au dénouement certes attendu mais qui prend un cheminement tortueux avec le charme de deux personnages très attachants.

mardi 16 février 2021

Rencontres imprévues, tome 1 ; trois rendez- vous à l’aveugle, Meghan Quinn (MxM Bookmark, Infinity, (10/2019)


 

Rencontres imprévues, tome 1 ; trois rendez- vous à l’aveugle, Meghan Quinn (MxM Bookmark, Infinity, (10/2019)

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J’ai vraiment passé un très bon moment en lisant cette romance « feel good » ; j’ai même ri aux éclats lors de certains passages, tant l’écriture cinématographique de Meghan Quinn m’a permis de visualiser certaines scènes vraiment hilarantes ! Le personnage de Noely Clark est tellement construit de clichés que c’en est incontestablement risible ! Cette animatrice télé est en effet sexy, intelligente et riche… mais désespérément célibataire ! Elle va donc tester, pour le plus grand plaisir (sadique) du producteur de son émission, une toute nouvelle application mobile lui permettant de rencontrer l’âme sœur , intitulée « A l’aveugle ».

« Je ressemble à une prostituée classe qui cherche à passer du bon temps. Vous remarquez que j'ai dit classe et pas crasse ? Grande différence. Même si mes seins débordent de ma robe noire cintrée qui s'arrête au milieu de mes cuisses, mon maquillage ne coule pas et je porte des sous- vêtements... dont une culotte qui couvre toute mes fesses.
Vous voyez la différence ? »
Premier rendez-vous avec le profil masculin qui lui correspond le mieux selon le fichier de l’application, « Noeud Windsor » ; Noely essaie d’être aussi « classe » que son homologue en costume ; mais hélas, ce sera peine perdue…

Deuxième rencart, troisième… A chaque fois, Noely y croit, mais la pauvre ne fait que cumuler des échecs…. Heureusement, elle a la chance de pouvoir compter sur Dylan, la coprésentatrice de son émission mais aussi sa meilleure amie ; ainsi que la famille de son frère (tous plus allumés les uns que les autres !!!). Avec eux, aucun risque de s’apitoyer sur son propre sort !

Noely touche pourtant le fond ; aura-t-elle un jour la chance de rencontrer l’homme qui fera battre son cœur et avec lequel elle pourra envisager de se construire un avenir, à son tour ? Une application pourrait- elle vraiment lui apporter sur un plateau celui qui lui passera, enfin, la bague au doigt ? Seul l’épilogue vous le dira !

Bref, une romance vraiment parfaite pour les vacances ! Le personnage de Noely est attachant, même s’il reste quelques petites zones d’ombre de son passé que j’aurais aimé comprendre… Le rythme est globalement trépidant et on ne s’ennuie pas une minute, excepté vers les soixante dernières pages qui font traîner en longueur une résolution que le lecteur avait déjà deviné depuis un moment. Sans ce passage et les quelques loupés dans les accords du participe passé, ce roman aurait été un joli coup de cœur ! En tout cas, j’ai très envie de lire le tome 2 !

samedi 13 février 2021

Royan : La professeure de français, Marie NDiaye (Gallimard, 11/2020)


 

Royan : La professeure de français, Marie NDiaye (Gallimard, 11/2020)

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Marie NDiaye signe là un monologue poignant, à l’origine destiné à être interprété par la comédienne Nicole Garcia à l’occasion du dernier Festival d’Avignon (lequel a été annulé du fait de la Covid). C’est donc une lecture surprenante, car le texte est, avant tout, destiné à l’oralité. Le point de vue interne y est donc particulièrement exacerbé et il faut accepter de se fondre dans les errements de l’esprit du personnage pour pouvoir comprendre l’essence des mots qui le composent….

« Il me semble de temps à autre que je suis le personnage miraculeusement devenu vivant d'un roman qu'une femme dans mon genre aurait écrit et proposé sans succès à plusieurs dizaines d'éditeurs. » Cette professeure de français d’un lycée de Royan rentre chez elle après un événement dramatique : l’une de ses élèves, prénommée Daniella, s’est jetée du troisième étage de l’établissement, durant son cours. Elle sent que les parents de l’adolescente l’attendent sur son palier, à la recherche d’explications ; éléments que, mentalement, elle est en incapacité de donner…

« Je ne suis pas une femme aimée – ou peut- être que si et mes yeux affolés de soleil m’empêchent de voir ? » Pourtant, sa culpabilité est partiellement engagée :   Daniella lui avait fait part de ses tracas en lui écrivant à plusieurs reprises, elle avait voulu lui confier le harcèlement douloureux dont elle était la victime. Mais son enseignante a préféré fermer les yeux.

« Qu’avez- vous fait parents pour dompter la tignasse de Daniella                                   sa crinière vociférante ?"  La professeure de français, telle une Phèdre des temps modernes, se cherche des excuses, mêlant ses errances à celles de cette héroïne de la tragédie racinienne ; revenant sur son propre parcours, celui d’une femme qui s’est volontairement endurcie, tout en échappant à ce qui aurait pu faire d’elle une femme épanouie et heureuse.

« on ne doit pas gâter les filles mais les armer les tremper les durcir pour la vie » nous dit- elle. Mais à être trop dure avec soi- même, force est de constater que l’on passe à côté de l’essentiel…

Au final un texte poétique impossible à lâcher, qui, forcément, désarçonne et laisse des traces. Comme j’aimerais le voir exploité sur scène !!!

mercredi 10 février 2021

Le berger, Anne Boquel (Seuil, 02/2021)



 Le berger, Anne Boquel (Seuil, 02/2021)

💛💛

Un premier roman terriblement tentant par sa thématique : la peinture « sans complaisance » d’une secte dans le cadre d’une emprise sur personne influençable. Celle- ci, en l’occurrence, se nomme Lucie. En mal d’amour, de reconnaissance et en proie à de grandes questions existentielles, il ne faudra pas beaucoup d’insistance à Mariette, sa collègue, pour l’emmener dans un groupe de prière. 

« Il y avait des choses qu’il fallait vivre, et même sentir, si l’on voulait, une fois pour toute, changer de vie. » Lucie trouve dans la Fraternité menée par l’énigmatique Thierry, surnommé le Berger, une chaleur humaine qui lui avait longtemps fait défaut. Récemment séparée de son dernier compagnon, la vie mondaine de ses parents ne lui avait jamais convenue ; Lucie étant d’une nature secrète et effacée.

« Mais le cœur, son cœur, trouvait son compte à ces phrases prononcées avec ferveur et conviction. » Les prières, le jeûne et l’ascèse sont des actes dans lesquelles Lucie trouve son compte. C’est décidé, elle se donnera corps et âme à la Fraternité, et à Thierry qui semble à ses yeux être l’incarnation du Messie.

« L’obéissance absolue, en quelques semaines, devint sa règle de conduite. Elle s’y accrocha comme un naufragé à sa planche de salut. Il lui avait fallu du temps pour abdiquer toute volonté. Elle se complaisait maintenant dans cette soumission de tout son être avec un calme qui la ravissait. C’était dans l’ordre des choses, ce don d’elle- même où elle trouvait enfin les extases que lui refusait la foi : une bénédiction, qui prouvait son élection. » Mais voilà, de mensonges en actes délétères, Lucie va atteindre un point de non – retour.

J’avoue avoir eu du mal à supporter la lecture la première partie du roman. Beaucoup trop de platitudes et un rythme narratif quasi inexistant ont failli m’en faire abandonner la lecture.  De plus, Lucie est malheureusement restée un personnage auquel je ne me suis pas attachée parce qu’il était bien trop incomplet. Impossible pour moi de visualiser mentalement une silhouette ou de comprendre un quelconque fonctionnement mental. Et je ne parle pas des personnages annexes… Les cent dernières pages sont un peu plus intéressantes…

Au final, un premier roman qui promettait des éléments de lecture intrigants mais qui ne parvient pas à accrocher son lecteur. Les situations se répètent sans donner d’éléments qui pourraient pourtant montrer un intérêt certain à la compréhension de l’emprise sectaire (prières, discours prosélytes) et le lecteur reste sur ses incertitudes, et sur sa faim…

dimanche 7 février 2021

Engrenage, Tome 3: Un espoir dans les décombres, Lucie Goudin (Elixyria, 05/2020)

 



Engrenage, Tome 3: Un espoir dans les décombres, Lucie Goudin (Elixyria, 05/2020)

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J’ai pris mon temps pour lire ce tome 3 de la saga Engrenage, de Lucie Goudin, certes le plus gros avec ses presque 600 pages, mais aussi le plus captivant et le plus abouti. Heaven, Kragen et leurs famille et amis vont rester ancrés en moi un petit moment tellement je me suis attachée à eux, et lire la fin de leurs aventures s’est avéré plutôt émouvant…

« Tant qu'elle savait qui elle était vraiment, ce qui la définissait, elle restait Heaven, une combattante hors pair avec un passé douloureux et un avenir qui ne pouvait que s'annoncer plus prometteur. » Après avoir vu deux Engrenages tomber et des milliers de personnes mourir, Heaven prend la route vers Espéria, une cité reconstruite en secret par quelques explorateurs aventureux et optimistes sous les ordres de l’intendant Patton. Personne ne sait si le projet a pu aboutir, ni perdurer, au milieu de nulle part, et entouré de monstres engendrés par les radiations émergées des bombes nucléaires lancées lors de la Troisième Guerre mondiale. Nous sommes en effet en 2132, ère de l’incertitude et du chaos.

« Bientôt, ses yeux s'ouvrirent. J'y vis un voile de tristesse et détournai le regard Je détestais percevoir ce sentiment chez les autres, parce qu'il me rappelait la mienne et, dès lors, je sombrais au cœur de mes tourments. » Alors qu’elle s’engage sur des terres désertées et enneigées, Heaven a le cœur lourd car elle ne sait pas si Kragen, le seul homme à avoir réussi à gagner son cœur et sa confiance est toujours vivant. Ayant dû rester sur son Engrenage, du fait de son statut de capitaine de la sécurité, ce dernier s’est vu confier la gestion du sauvetage des survivants, évacués vers d’autres Engrenages acceptant de les accueillir momentanément. Comme son frère aîné Ash agit de manière de plus en plus ambiguë et que le reste de sa famille se désespère du froid, de la faim, et de la fatigue endurée, Heaven a parfois du mal à contenir ses émotions ; vont -ils arriver au but, et trouver enfin cette cité où on leur a promis sécurité et dignité ?

Après des jours de voyage exténuants, les voilà enfin en sécurité, mais très vite, de nouveaux conflits voient le jour : « Les gens s'enrôlaient dans l'armée, puis ne pensaient plus par eux- mêmes. Ils exécutaient les ordres d'une minorité totalitaire et égoïste sans réfléchir aux conséquences. A la fin, le mal devenait le bien. » Heaven et Kragen vont se retrouver mais certainement pas pour couler des jours heureux : à peine les retrouvailles fêtées qu’un nouveau combat les attend déjà…

L’auteure, de sa plume véritablement addictive a su m’embarquer dans une dystopie rythmée et passionnante. Quelle imagination ! Je n’oublierai pas Heaven et Kragen de sitôt, sûre qu’ils viendront peupler mes propres rêves ! Enfin, on va dire que je l’espère…

jeudi 4 février 2021

Lettre à ce prof qui a changé ma vie – Enseigner la liberté, 40 personnalités s'engagent (Pocket, 11/2020)


 

Lettre à ce prof qui a changé ma vie – Enseigner la liberté, 40 personnalités s'engagent (Pocket, 11/2020)

En hommage à Samuel Paty

💓💓💓💓💓


J’ai savouré ce recueil, je l’ai lu à petites doses… Forcément. Etant moi – même professeur, je ne pouvais qu’être touchée par ces témoignages de personnalités qui se sont plongées, le temps de quelques lignes, dans leur mémoire d’écolier, pour rédiger une lettre au(x) professeur(s) le(s) plus marquant(s) de leur parcours scolaire.

Pour une fois, en guise de chronique, j’ai envie de laisser la parole à ces personnalités qui ont si bien su poser des mots en l’honneur des professeurs qui ont jalonné leur vie, mais aussi, et surtout, en hommage à ce collègue éloigné que fut Samuel Paty.

« C'est là le plus grand don des professeurs, transmettre le savoir pour ouvrir les esprits, faire naître des désirs, et une farouche envie de vivre. » (Marc Levy).

« La plus belle chose que vous m'ayez apprise, c'est de mettre des points d'interrogation au bout de mes certitudes. » (Raphaëlle Giordano)

« C'est peut- être pour ça que tu souhaitais nous voir épanouis dans ta salle de classe ? Parce que tu savais toute la valeur d'une enfance nourrie à l’intelligence ? Tu le savais, n'est- ce pas, qu'une des meilleures armes contre la bêtise et la noirceur du monde reste l’humour ? » (Anne - Laure Bondoux)

« Alors voilà, toi que je ne nommerai pas, toi qui a coupé la tête de Samuel Paty au nom de ta foi viciée comme une charogne, c'est mon prof que tu as tué, c'est- à- dire un Père. » (Philippe Torreton)

Bref, un recueil à lire et à faire lire à toutes les générations d’écoliers…