vendredi 29 avril 2022

Le Jardin - Tome 1, Audrey Rousselin (Elixyria, 01/2022)


 

Le Jardin - Tome 1, Audrey Rousselin (Elixyria, 01/2022)

 💛💛💛💛

Comment sera notre futur ? Dans quel genre de société évolueront nos descendants, entre la planète qui se réchauffe inéluctablement et semble approcher de la fin de ses capacités nourricières et les hommes qui y vivent de manière de plus en plus égocentrique ? Difficile d’être optimiste… Audrey Rousselin ne l’est pas dans ce premier tome de cette duologie. Sa dystopie nous présente l’évolution d’une héroïne, Kiaya, ayant été élevée dans un lieu nommé « Jardin » où seules les femmes sont acceptées. Endoctrinées depuis le plus jeune âge dans une croyance qui présente l’Homme comme étant un être démoniaque, elles sont pourtant obligées, dès l’âge de vingt ans, à participer à la « Récolte » : un accouplement programmé pour perpétrer l’espèce humaine.

 

« A sucer son pouce comme il le faisait d'un air si charmeur, on aurait pu s'y méprendre, mais il ne s'agissait pas d'un ange, loin de là. J'avais la créature du diable tout contre moi. » Mais voilà, seules les filles sont acceptées au Jardin. Donc les nouveaux- nés masculins sont automatiquement écartés, confiés à une gardienne qui en fera, hé bien, on ne sait quoi…

 

« Faire croire à des monstres était sans doute plus facile que d'admettre nos points communs. » Alors que c’est au tour de Kiaya de pousser la porte du box dans lequel elle sera fécondée, une insurrection éclate et la jeune femme, ainsi qu’Isaac, le géniteur qui lui a été assigné, sont enlevés. L’occasion pour Kiaya de se rendre compte qu’un homme, ce n’est pas si différent d’une femme.

 

« Face à l'entrée, à un pas des ténèbres, je songeai à ma famille. Elle seule pouvait me donner la force d'avancer. Abandonner serait revenu à signer notre arrêt de mort, alors quand Isaac me tira en avant, je laissai ma fierté de côté et le suivis sans broncher. » Kiaya, naïve de la réalité du monde qui entoure l’espace protégé du Jardin, va se faire manipuler de tous côtés. Qui est- elle ? Que veut- elle ? Elle est totalement perdue entre mensonges, secrets et machinations ; qui croire et qui suivre ?

 

Au final, un premier tome très bien écrit. L’univers inventé par l’auteure est original. J’ai beaucoup aimé les passages durant lesquels l’héroïne se retrouvait confrontée à notre réalité actuelle. J’ai pourtant eu bien envie de la secouer, cette jeune Kiaya qui manque de personnalité. J’espère la voir plus affirmée dans le second tome ! Une histoire intelligente qui permet de prendre un certain recul par rapport à notre société, cette avidité de pouvoir, qu’elle soit masculine ou féminine, et qui nuit plus souvent qu’on ne le croit aux relations hommes – femmes… 

mardi 26 avril 2022

Ne te retourne pas, Jenifer L. Armentrout (J'ai lu, 02/2022)



Ne te retourne pas, Jenifer L. Armentrout (J'ai lu, 02/2022)

💗💗💗💗💗

 Depuis que j’ai élargi mon horizon de lecture à coups de fantasy et de romances, j’ai souvent vu cité le nom de Jennifer L. Armentrout. Jusqu’à ce thriller « young adult », aucun titre n’avait véritablement attiré mon attention. Ici nous sommes dans un lycée américain avec tous ses clichés : les filles riches et pas forcément futées y côtoient les beaux mecs qui jouent dans les équipes de foot ou de base- ball universitaires. On se trahit, on se venge à coups de griffes manucurées et de coups de sacs D&G.

 

« Pour une raison qui m'échappait, j'avais des difficultés à marcher. Je trébuchai sur l'asphalte glacé. En sentant le gravier coupant s'enfoncer dans la plante de mes pieds, je tressaillis.
Depuis quand étais-je pieds nus ? »
Le roman s’ouvre sur la jeune Samantha qui se réveille en pleine forêt. Que fait- elle là ? Que lui est- il arrivé ? Elle a tout oublié, même son identité…

 

« J'étais coincée dans cette vie que je ne me rappelais pas, enfermée dans l'enveloppe de cette fille, de cette Samantha Jo Franco, et plus j'en apprenais à son sujet, plus je la détestais. » Samantha a retrouvé ses parents, ses amies et son petit- ami, mais un malaise persiste : elle ne se reconnaît pas dans le portrait que ceux- ci font d’elle. Est-elle vraiment cette garce que tous décrivent sans hésitation ?

 

« Quand je me tournai vers les filles, mes amies, je m'aperçus que ce n'était pas de l'inquiétude pour moi qui se lisait dans leurs yeux. Je refusais d'abord d'y croire, puis je dus me faire une raison. Leurs regards sombres ne reflétaient qu'une chose :
Des soupçons.
 » Samantha n’était pas seule lors de la nuit de sa disparition ; sa meilleure amis, Cassie, avait passé la soirée avec elle, sous les yeux de nombreux témoins. Mais sauf que Cassie, elle, ne réapparaît pas… Où est-elle ? Que lui est- il arrivé ? Quel rôle Samantha a-t-elle joué dans sa disparition ?

 

Au final, un récit terriblement addictif, servi par une plume habile, très bien traduite au vu du déroulement de l’intrigue et de la retranscription du milieu universitaire américain, bien différent du nôtre. Je n’ai absolument pas deviné la fin, diabolique, et j’ai pris plaisir à avancer avec Sam au fur et à mesure de ses flashes, seuls détenteurs de la vérité. Une auteure que je vais continuer à découvrir ! 

dimanche 24 avril 2022

La nuit des anges, Anna Tommasi (Préludes, 03/2022)



 La nuit des anges, Anna Tommasi (Préludes, 03/2022)

💓💓💓💓💓 

Je referme avec stupeur cet excellent premier roman ! Anna Tommasi m’a menée par le bout du nez du début à la fin. J’ai cru identifier le coupable de l’intrigue à dix reprises, et à chaque fois, un retournement de situation m’a fait comprendre que j’avais fait fausse route, et cela jusqu’à la résolution de cette effrayante histoire !

 

« Dr Schreiber: J'aimerais que tu me dises pourquoi, à ton avis, tes parents n'ont pas envie de venir te voir.
Note: L'enfant lève enfin les yeux et sourit.
L'enfant: Parce qu'ils ont peur de moi. »
Le roman s’ouvre sur la retranscription d’une séance de psychothérapie. Il y en aura d’autres disséminées dans le livre. Leur contenu est déstabilisant. Seule la fin vous en donnera la clé !

 

"Protège ton petit, Alice. Ne le quitte pas trop longtemps des yeux. Les loups les plus dangereux sont eux qui attaquent près de leur tanière." Cela fait vingt- cinq ans qu’Alice n’est plus revenue sur les terres bretonnes de son enfance. Elle est partie faire sa vie à Paris, où elle s’est mariée et a eu un petit garçon prénommé Lucas, et comme celui-ci est porteur de troubles autistiques, il a été compliqué jusque là d’envisager sereinement tout déplacement. C’est le décès brutal de l’un des membres de sa bande d’amis de jeunesse qui va pousser Alice à revenir à Perros. Mais à peine arrivée, voilà que les tristes souvenirs qu’elle avait enfouis profondément ressurgissent à l’occasion de la disparition d’une petite fille ; Victoire, la meilleure amie d’Alice avait jadis elle aussi disparu dans d’étranges conditions…  

 

« - Ces dessins ne sont pas forcément l'œuvre d'un tueur en série, en théorie. Mais de quelqu'un qui n'est pas capable de ressentir du remords, de la culpabilité ou de l'anxiété à l'idée de transgresser les règles, très certainement. » Alice retrouve sur place Teddy, le frère de Victoire, mais aussi son ancien petit- ami. A deux, ils vont fouiller le passé et découvrir de bien vilains secrets… L’enfant dérangé n’est pas celui que l’on a jadis désigné.

 

Au final, un roman impossible à lâcher ! L’intrigue commence en douceur ; l’auteure disséminant des indices d’abord imperceptibles, puis de plus en plus troublants, jusqu’à ce que l’horrible vérité éclate ! J’ai aimé être bluffée à ce point ! Vivement le prochain !

mercredi 20 avril 2022

Luna, Serena Giuliano


 

Luna, Serena Giuliano (Robert Laffont, 03/2021 - 2022 pour la version poche)

💘💘💘💘💘

« J'ai pris conscience que la vue sur la mer ne servait à rien, si tu n'étais pas là pour l'admirer avec moi. » Cette phrase, c’est un père qui l’adresse à sa fille, une fois sorti de l’hôpital après avoir subi une attaque cardiaque. Une phrase qui paraît excessive, ou maniérée, livrée comme ça, mais qui vous retournera comme une crêpe quand vous la lirez dans les dernières pages de ce roman…

 

« Mon père ne mérite pas que l'on souffre pour lui. Il m'a si souvent répété qu'il ne fallait pas perdre son temps pour ceux qui n'en valent pas la peine. J'aimerais être aussi insensible que lui, mais il faut croire que les chiens font parfois des chats. » Luna se rend à l’hôpital dans lequel son père vient d’être pris en charge alors que cela fait des années qu’ils ont coupé tout lien. Va- -t- elle parvenir à lui pardonner les mauvaises décisions d’antan ?

 

« C'est peut- être à cause du souvenir de mon papa d'avant. Celui avec qui j'allais au bar le dimanche matin manger une sfogliatella - cette pâtisserie napolitaine dont je raffolais déjà gamine. Celui que j'entends encore rire de me voir avaler ça goulûment, comme si j'en découvrais chaque semaine la saveur unique. » Luna a quitté son père, mais aussi la ville de Naples, le jour où sa mère a quitté le domicile conjugal pour refaire sa vie à Milan. Luna a, elle aussi, abandonné à la fois son père mais aussi ses amis et sa cousine adorée, Gina, en suivant sa maman, tout en étant persuadée de bien faire. Mais les années ont passé et l’accident cardiaque de son père la met face à son passé : a- t- elle vraiment fait une croix sur les membres de sa famille qui avaient pourtant tellement compté durant son enfance napolitaine ?

 

« Ces dernières heures, Gina a commencé quasiment toutes ses phrases par : "Et tu te souviens de .... ?" Elle m'a remémoré tout un tas d'anecdotes, restitué de nombreux fragments de mon enfance que j'avais perdus en chemin, d'instants passés qui appartiennent à une autre vie, lorsqu'on était pleinement heureuses, et presque insouciantes.
Ce que l'on vit en ce moment même, je ne l'oublierai pas. Rien ni personne ne devrait séparer deux femmes qui s'aiment. »
Gina, la cousine de Luna, a longtemps fait office de sœur et de meilleure amie. Restée à Naples, elle a construit sa vie malgré les difficultés. Luna va alors se rendre compte de la valeur de ce qu’elle a perdu en s’exilant – aveuglément ? - avec sa mère à Milan…

 

Au final, un roman qui laisse monter les incertitudes au fil des pages. Qui sommes- nous loin de notre famille ? Les raisons qui nous font fuir sont- elles éternellement valables ? Qu’en est- il du pardon ? Que fait- on du droit à l’erreur ? Serena Giuliano prend une plume légèrement sarcastique, sur fond de proverbes napolitains, pour pointer nos décisions qui, sur fond d’éthique, brisent les sentiments sincères d’une histoire familiale. Vrai. Bouleversant.  

lundi 18 avril 2022

Quand dansent les âmes, tome 4 : L’étreinte des ténèbres, Lucie Goudin (Elixyria, 02/2022)


 

Quand dansent les âmes, tome 4 : L’étreinte des ténèbres, Lucie Goudin (Elixyria, 02/2022)

💓💓💓💓 

Je ferme ici le quatrième et dernier tome de la saga « Quand dansent les âmes », imaginée et rédigée par une jeune plume talentueuse nommée Lucie Goudin. Cap sur la Bretagne, ses menhirs et ses légendes ! Après Anna la scribe, Sélène la rebelle et Tristan l’Alpha inconsolable, c’est au tour de Brieg, le loup maudit, d’occuper le devant de la scène. Alors que les meutes de Konan et de Tilio continuent à semer la terreur en Bretagne, voilà qu’Erell, une sorcière appartenant à la catégorie des Vaillantes, semble capable de lui redonner un soupçon d’espoir…

 

« S'il a accepté son sort ? Non.
S'il pouvait ressusciter la sorcière qui l'a mis dans cet état pour la tuer à nouveau, il le ferait plutôt deux fois qu'une. »
Depuis deux années que Brieg est bloqué dans sa condition de loup, il ne rêve que de vengeance. Il a déjà bien du mal à accepter la présence d’une sorcière, Elisabeth, au cœur de sa meute, alors quand il se retrouve face à Erell, lors de leur repli de l’Autre côté, il a bien envie d’assouvir sa soif de sang envers cette espèce…

 

« Les belligérants ne sont pas censés pouvoir pénétrer les terres neutres, les informa Elisabeth. Un champ de force scanne les intentions des visiteurs. Tout mauvais dessein détecté entraîne une expulsion immédiate. En temps normal, je dirais que ces loups ne peuvent aller plus loin et que nous sommes désormais en sécurité, mais la présence de sorcières dans leur camp balaie toutes mes certitudes. De quoi sont- elles capables ? Nous l'ignorons. » Mais Brieg doit se mesurer. Sa meute a besoin de soutien. Il doit faire profil bas pour que les doléances de l’Alpha, Tristan, soient écoutées. Et peu importe si c’est une sorcière qui leur sert de faire- valoir.

 

« Le signal d'assaut avait dû être déterminé avant leur arrivée. Ils n'eurent aucune seconde d'hésitation, pas le moindre questionnement sur la signification d'un tel geste. Ils n'avaient donc jamais eu l'intention de repartir sans semer un carnage. Les transformations se multiplièrent. Les hurlements, les grognements, les mâchoires qui claquaient dans le vide en signe d'impatience créèrent une cacophonie sans précédent. » Le hasard, ou plutôt le destin, a fait que Brieg et Erell se sont rapprochés. D’ennemis désignés, ils sont devenus complices. Leur lien est une force à ne pas négliger pour faire face à une apocalypse menaçant l’équilibre du monde. L’abnégation sera leur ultime mission.

 

Au final, un tome qui conclue parfaitement la saga. Les interrogations et les mystères soulevés dans les précédents épisodes trouvent ici leurs réponses. Si j’avais un conseil, ce serait de lire les tomes de manière assez rapprochée car personnellement, au début, j’ai eu un peu de mal à me repérer au niveau des personnages secondaires. La saga complète est parfaitement élaborée, portée par les légendes ancrées dans l’histoire de la Bretagne, mais aussi servie par des personnages très charismatiques, auxquels on s’attache très vite. A lire pour s’évader, frémir et rêver…   

mardi 12 avril 2022

Le Royaume des cris, Mathieu Lecerf (Robert Laffont, 03/2022)


 

Le Royaume des cris, Mathieu Lecerf (Robert Laffont, 03/2022)

 💛💛💛💛💛

Mathieu Lecerf a de nouveau réussi à me bluffer avec ce deuxième volet qui forme une trilogie avec « La part du démon » et un opus encore mystérieux qui sortira probablement l’année prochaine ! Quel plaisir de retrouver Esperanza et Manny après les nombreuses mésaventures incroyablement risquées qu’ont subies nos deux policiers. La fin du premier tome annonçait déjà que l’auteur les malmènerait toujours autant par la suite ! Et je peux vous dire qu’il ne les ménage pas, nos flics du « Bastion ».

 

« Sept mois.
Sept mois qu'Esperanza, ses parents et leurs proches se débattaient dans la peur et le chagrin. Ce qu'avait d'intolérable cette disparition était redoublé par l'effroi de n'avoir pu obtenir aucune explication.
Sept interminables mois. »
Mia a disparu et le cauchemar qui a brisé Esperanza lorsqu’elle était adolescente revient la hanter au plus près. Mais qui donc lui veut autant de mal ? Aucune piste. Aucun indice. Aucun espoir. L’équipière favorite de Manny n’est plus mentalement disponible pour une nouvelle enquête. Et pourtant, un sniper fou a fait six victimes en plein cœur de Paris, et la PJ a besoin de tout le monde sur le pont. C’est l’occasion que choisit Cris pour réapparaître et fouiller comme seul un journaliste intuitif sait le faire.

 

« Soleil, argent, tranquillité. Tout se déroulait dans le meilleur des mondes pour eux, quand soudain, un jour qui ressemblait pourtant à n'importe quel autre, Ernesto décida finalement d'écouter la petite voix.
Cette voix qui chuchotait en lui depuis des années, et qui ce jour- là hurla dans toute son âme. »

Direction la Colombie, là où tout est possible pour qui vend son âme au Diable. La Colombie et deux démons qui sèment leur folie en Europe.

 

« Esperanza avait été traquée durant les mois suivants, épiée à chaque étape de sa quête, de Paris à Rouen. Dans tous les départements qu'elle avait visités, l'œil qui la suivait la scrutait sans intermittence. » Notre héroïne est prête à tout pour sauver Mia. Manny est prêt à tout pour sauver Esperanza. Mathieu Lecerf nous offre un final qui claque à la manière d’un feu d’artifice. Une fois la dernière ligne lue, refermez le livre… Et respirez !


Au final, un thriller palpitant, aux retournements de situation inattendus. Il y a des passages qui tordent les tripes mais pas par leur côté « gore », non, plutôt par les émotions qu’ils engendrent ! Vivement le troisième tome !!! 

samedi 9 avril 2022

T’inquiète pas, maman, ça va aller, Hélène de Fougerolles (Le livre de Poche, 03/2022)



 T’inquiète pas, maman, ça va aller, Hélène de Fougerolles (Le livre de Poche, 03/2022)

💙💙💙💙

 

Quand une actrice française prend la plume pour parler de sa vie, on peut avoir quelques a priori… Mais quand elle décide de s’exprimer pour témoigner de la dure réalité du quotidien d’un parent d’enfant différent, en l’occurrence porteur de troubles autistiques, le récit revêt un certain intérêt au regard de notre société qui ferme bien souvent les yeux (et plus…) aux personnes n’entrant pas dans la sacro- sainte « norme ».  

 

« Elle parle aux nuages et aux amis invisibles qu'elle porte sur ses épaules... Et puis il y a "les autres" aussi, ceux qui vivent dans sa tête.
Ma fille n'est jamais seule et moi tellement. »
Hélène de Fougerolles avait prévu d’avoir un enfant à l’âge de 30 ans. La petite Camille est née, mais voilà, les mois passent et une évidence se fait jour ; elle n’évolue pas comme les enfants de son âge. 

 

« En regardant ma fille grandir, en grandissant avec elle, j'ai cessé de pleurer sur mon sort, j'ai changé de point de vue et des centaines d'horizons nouveaux se sont ouverts. » Une petite fille qui n’exprime aucun désir élémentaire comme la faim ou la soif, qui ne parle toujours pas à quatre ans, qui reste assise des heures, enfermée dans son propre monde ; comment la comprendre ? C’est l’école qui va pousser les parents à ouvrir les yeux : Camille a besoin de voir des spécialistes pour qu’un diagnostic soit posé sur ses particularités.

 

« Je refuse toute réalité me rappelant que ma fille est différente. Rien que ce mot, "handicap", je n'en veux pas, je ne veux pas l'entendre. Je ne veux pas le lire et encore moins l'écrire. » Et pourtant, Hélène de Fougerolles va devoir l’accepter. Camille est porteuse de troubles autistiques. Son développement et sa manière de communiquer seront toujours différents de la norme. Après des années de déni du handicap, la maman ouvre enfin les yeux sur la réalité de sa fille et accepte sa différence, avec ce que cela implique comme contraintes mais aussi les nombreuses réussites, permises par des prises en charge structurelles adaptées.

 

Au final, un récit lu avec intérêt, qui montre bien le parcours du combattant que représente encore l’irruption du handicap dans une famille. C’est écrit simplement, avec humilité. N’hésitez pas à le lire si le sujet vous intéresse.

lundi 4 avril 2022

Valse froide, Pierre Thiry (auto- édition, 02/2022)



Valse froide, Pierre Thiry (auto- édition, 02/2022)

💙💙💙💙💙


Trop bien, ce petit bouquin ! En trois nouvelles, Pierre Thiry a su m’emmener dans un univers à la fois poétique et moqueur ! La première nouvelle, éponyme, souffle une ode à la nature et à la musique sur un fond dramatique, la deuxième, « Lia Métonymie » vous emmène sur un pas léger de danse dans des voyages éthérés et littéraires (avec un joli clin d’œil au premier récit !), et la dernière, « La Plume rebelle », prend des allures de fabliau des temps nouveaux.

 

« Sous ses yeux, un homme était étendu, un cadavre, froid dans la matinée froide. C'était un sinistre matin d'hiver glacial. Alors elle regardait dans le ciel les nuages mimer la valse de Berlioz. Pourquoi ce cadavre était- il étendu dans cette prairie ? La petite fille l'ignorait, mais elle était résolue à enquêter pour l'apprendre. » Cette petite fille, c’est Eve, que l’on retrouve adulte, artiste- plasticienne. Cette jeune maman contemplative est en admiration devant sa petite fille de quatre ans tout en se questionnant ; saura-t-elle la protéger des drames de la vie ?

 

« Ce jardin est splendide. Des effluves de beauté imprègnent le décor. Tu entres dans un univers romanesque. Tu passes au travers d'épisodes qui te débordent. Soudain, au milieu du parc, un livre qui traîne t'attire. Est- ce l'objet de tes rêves ? » Est- ce ici la métonymie adressée au lecteur, tenant l’objet de ses rêves dans ses propres mains ?  

 

« Il était beau, Léon. Il avait de la prestance, de l'aisance, de l'assurance. Quand il passait, elles gloussaient toutes. » Sacré Léon ! Il m’a bien fait sourire celui – là ! Même s’il finit en cocotte, on va encore longtemps parler de lui !

 

Au final, un recueil savoureux, à lire pour un moment 100% plaisir !


dimanche 3 avril 2022

La part du démon, Mathieu Lecerf (Pocket, 03/2021)


 

La part du démon, Mathieu Lecerf (Pocket, 03/2021)

💘💘💘💘💘


Pour un premier roman, Mathieu Lecerf maîtrise parfaitement l’art du suspens tout en proposant un schéma de narration original et efficace. En effet, ce thriller possède une structure particulière puisque découpée en trois parties ancrées dans des espaces- temps différents, lesquels permettent d’aborder l‘enquête du point de vue de trois des principaux protagonistes. Et en guise de cerise sur le gâteau, une résolution au mécanisme impeccable dans lequel les engrenages, subitement, s’imbriquent pour mieux faire frémir le lecteur.

 

« Le son de l'horloge,
le parfum des oliviers,
le sang qui s'agglomère.
Le corps massacré de cette fille repêchée aux Buttes- Chaumont. 06 :01.
Elle continua de serrer. »  
Pour sa première enquête, Esperanza Doloria se voit confrontée à un cas complexe : une jeune religieuse est retrouvée assassinée et sauvagement mutilée. Son équipier, Manuel de Almeida, est lui aussi ébranlé. Mais il accueille avec bienveillance sa nouvelle coéquipière, du moins, dans un premier temps.

 

« Pour avoir les idées claires, il était primordial que son environnement le soit aussi, enfin, à sa manière à lui ; que chaque meuble, chaque accessoire, chaque livre, chaque œuvre, se trouve exactement à la place qu'il lui avait assignée ; c'était uniquement ainsi qu'il pouvait évoluer sereinement, c'était comme ça qu'il avait trouvé son équilibre, construit son refuge. » Cristian est le frère de Manuel, surnommé « Manny ». Journaliste médiatique, il demeure néanmoins toujours sous l’aile protectrice de son frère. Son truc ? Résoudre des affaires judiciaires en parallèle de Manny.  

 

« - Vous allez voir le mal absolu, et vous devrez le regarder droit dans les yeux. Vous n'aurez pas le choix. » L’enquête de Manny et d’Esmeralda piétine, quand celle de Cris avance à grands pas de travers. Et puis, ce pensionnat dans lequel enseignait la religieuse assassinée va questionner nos protagonistes. Que cachent les murs de ce pensionnat dirigé par un ancien militaire ? Et qui sont ceux qui ne cessent de mettre des bâtons dans les roues de nos policiers, quitte à mettre leur vie en péril ?

 

Au final, un thriller mené de main de maître ! Les personnages principaux ont tous des fêlures qui les rendent forcément attachants, et l’enquête à laquelle ils sont confrontés ne fait que rouvrir des blessures enfouies à des degrés divers de profondeur. J’ai aimé être surprise et émue par les propositions de Mathieu Lecerf. Son deuxième roman sera assurément l’une de mes prochaines lectures.