dimanche 31 août 2025

Comme un père, Christian Authier (Les éditions du Rocher, 08/2025)

 



Comme un père, Christian Authier (Les éditions du Rocher, 08/2025)

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Une très belle surprise de cette rentrée littéraire ! C’est grâce à ma libraire que j’ai lu ce roman, un peu perdu dans la masse des nombreuses nouveautés. Une belle découverte, lue en seulement deux jours, tellement le récit m’a captivée !

« De quoi parle-t-on avec lui ? Comment appelle-t-on un tel individu ? Un salopard ? Une ordure ? Un fou ? » Alexandre, la vingtaine, mène une vie routinière entre rédaction d’articles culturels pour un journal et balades dans la ville de Toulouse avec ses amis. Le jeune homme fait partie des privilégiés puisqu’il a hérité un logement et des fonds de sa famille appartenant à la haute bourgeoisie française. Mais malgré tout, Alexandre a grandi comme un orphelin ; son père a disparu de sa vie alors qu’il avait cinq ans, et sa mère est décédée alors qu’il était adolescent. Alors quand son père resurgit comme si de rien était, c’est un grand chambardement dans sa vie.

« Alexandre buvait les paroles de ces anciens combattants du dérisoire, grands gamins qui en vieillissant essayaient de retarder la marche du temps tout en constatant que leurs retours dans le passé ne faisaient que souligner à quel point celui- ci s'éloignait chaque jour un peu plus. » En retrouvant son père, c’est tout un univers que va découvrir Alexandre. Les copains qui ont vécu mille anecdotes dans le cadre d’affaires obscures aux quatre coins du monde vont animer bien des soirées des retrouvailles père- fils !

« De quoi héritait- on de ses parents au- delà éventuellement du physique ? Du caractère, des sentiments, de gestes ? Etaient- ils transmis par les gênes, le mimétisme, l'éducation ? » De manière générale, Alexandre va se poser des questions sur l’héritage naturel des liens familiaux. Quand on a si peu connu ses parents, comment se situer dans son histoire personnelle…

Au final, un récit tellement vrai, sincère, que c’en est émouvant. J’ai vraiment été touchée par les personnages d’Alexandre et de son père, Patrick. L’auteur leur construit une parenthèse de vie basée sur des référentiels différents, dus aux aventures paternelles aussi farfelues que possible. Un roman générationnel attachant et très bien écrit.  

mercredi 27 août 2025

Miss Islande, Audur Ava Olafsdottir (Zulma, 10/2022)

 


Miss Islande, Audur Ava Olafsdottir (Zulma, 10/2022)

💙💙

Cap sur l’Islande, pays où je rêve d’aller, pour suivre un pan de la vie d’Hekla, jeune femme de vingt et un ans, qui quitte la demeure familiale pour mener sa vie de romancière en herbe. Mais nous sommes en 1963, et les femmes qui s’écartent d’un quotidien d’épouse et mère ont bien du mal à trouver leur place, encore plus auprès des poètes locaux…

« Toi, tu étais transformée. Tu avais fait un voyage. Tu t'exprimais différemment. Tu parlais la langue des éruptions, tu employais des mots comme sublime, prodigieux et titanesque. Tu avais découvert le monde, tu regardais le ciel. Tu as pris l'habitude de disparaître. Nous te retrouvions allongée dans les champs, à observer les nuages, ou en hiver, sur une congère, à contempler les étoiles. » Hekla porte le nom d’un volcan ; son père étant passionné par les éruptions volcaniques qui sont légion en Islande. Et de fait, la petite fille se montre très tôt en osmose avec la nature ; une attitude contemplative qui va la mener à l’écriture de poèmes… qu’elle parviendra à publier, mais sous un pseudonyme masculin.

« La plupart des hommes qui aiment les garçons sont pères de famille, ils ne sont homosexuels que le week-end. Ils se marient pour cacher ce penchant contre- nature. Leurs femmes sont au courant. » Le meilleur ami d’Hekla, Jon John, ne trouve pas sa place dans la société islandaise, du fait de son homosexualité. Ses missions de marin le confrontent, de plus, à une homophobie exacerbée de la part de rustres islandais. Ce garçon hypersensible ne trouve du réconfort et de la tendresse qu’auprès d’Hekla.

« Les hommes naissent poètes. Ils ont à peine fait leur communion qu'ils endossent le rôle qui leur est inéluctablement assigné : être des génies. Peu importe qu'ils écrivent ou non. Tandis que les femmes se contentent de devenir pubères et d'avoir des enfants, ce qui les empêche d'écrire. » La meilleure amie d’Hekla, Isey, aime aussi s’épancher sur le papier, mais elle est mariée et mère de bientôt deux enfants. Impossible d’envisager l’écriture d’un roman dans ces conditions….

Au final, un roman que j’ai trouvé original par le constat qu’il fait de la condition de la femme, et plus particulièrement de la femme romancière au XXème siècle. Mais je me suis ennuyée… Et le style « minimaliste » des phrases (sujet -  verbe – complément) ne m’a pas plu. C’est dommage parce que le personnage d’Hekla méritait d’être plus élaboré.

samedi 23 août 2025

Tant mieux, Amélie Nothomb (Albin Michel, 08/2025)


 

Tant mieux, Amélie Nothomb (Albin Michel, 08/2025)

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Le Nothomb, cru 2025 vient de sortir. Et si je l’ai boudée dans les années 2010, j’ai renoué avec elle depuis quelques petites années pour le meilleur… et pour le pire. Mais heureusement, cette année, ça a été pour le meilleur ! Amélie Nothomb nous a livré ici un récit prenant, émouvant et de grande qualité stylistique !

« Il se produisit un glissement dans son esprit, l'univers perdit son assise sous elle et elle fut foudroyée par une découverte miraculeuse qui tenait en deux mots : tant mieux. » Adrienne est une enfant de quatre ans qui, si jeune, va devoir passer un été avec sa grand-mère maternelle à Gand. Une aïeule acariâtre, incapable d’aimer ses semblables, au point de les confronter à des situations ignobles, alors qu’elle voue une vénération sans borne à l’espèce féline. Comment trouver sa place dans un tel disfonctionnement émotionnel ?

« Elle n'avait jamais reçu ce dont un enfant a le plus besoin : de la considération. C'est encore plus important que l'amour. Être regardé pour ce que l'on est, c'est cela, être considéré. » Astrid, cette mère remarquable par sa beauté va faire de l’ombre à ses propres filles. Jacqueline et Adrienne se soutiennent en tant que sœurs, mais le manque d’amour, de considération fait naître des questionnements sur l’origine de ce rejet maternel. Faut- il être belle, intelligente, éduquée ? Le flou parental empêche les filles de devenir « femmes ».

« - Ma chérie, tu peux mentir, mais je t'interdis de devenir cinglée. » Le récit se resserre sur des dialogues intra- familiaux, puis sur les confessions de l’auteure, qui passe du « elle » narratif au « je » quand vient l’heure des confessions. Un moment prenant, très émouvant de vérité quant à l’amour d’Amélie pour ses parents.

Au final, un cru excellent. Outre la qualité narrative et lexicale, ce roman exprime des sentiments exacerbés de la part d’une enfant extraordinairement éclairée et mâture, capable d’analyser les rapports humains dans leur complexité, grâce au regard rétroactif de l’auteure adulte. Les bons et les mauvais côtés parentaux sont exprimés avec un jugement certes enfantin, mais tellement criant d’une vérité universelle que l’on ressent, tous, au plus profond de soi. Merci Amélie !

vendredi 22 août 2025

Surface, Olivier Norek (Pocket, 2019)

 


Surface, Olivier Norek (Pocket, 2019)

💙💙💙💙

C’est parce que France 2 diffuse l’adaptation de ce roman policier en six épisodes cette semaine que je me suis décidée à le sortir de ma PAL. Pourtant, je regarde très peu la télévision, mais ici, le tournage de la série a été réalisé dans la ville de Mazamet, que je connais très bien. Ma curiosité a donc été fortement titillée !

« J'ai plusieurs patientes en une même personne. Un flic qui risque de ne jamais retrouver son service. Une femme qui risque de ne penser qu'elle ne séduira plus. Une entité adulte qui doit découvrir le visage d'une étrangère et vivre avec. Et une gamine qui doit être morte de peur. » Noémie Chastain est capitaine de police, chef d’un groupe d’intervention dans le service des Stups. Un matin, la mission tourne mal et la jeune femme se retrouve gravement défigurée. Son quotidien va en être brutalement modifié : elle se voit obligée de quitter le 36 pour un petit commissariat en Aveyron, son petit- ami lui tourne le dos et sa confiance en elle est profondément ébranlée. Seul un psy, Melchior, parvient à la soutenir et la faire avancer dans sa nouvelle vie.

« Vous n'avez pas l'impression d'être dans un jeu spécialement créé pour vous ? Un profil intact pour un charmant village, l'autre profil blessé, pour un village sous l'eau qui réveille des souvenirs horribles. » Le commissariat de Decazeville tourne au ralenti depuis des années, au point de risquer d’être fermé. Noémie vit un nouveau choc ; elle qui aimait l’action et la vie trépidante de Paris se retrouve très vite à s’ennuyer auprès de ses nouveaux collègues. Quelques semaines après son arrivée, un cadavre va être découvert, et Noémie va pouvoir réendosser son uniforme d’enquêtrice hors pair.

Au final, j’ai beaucoup aimé cette histoire basée sur des secrets gardés au fond d’un village enfoui sous les litres d’eau retenus par un barrage. Le personnage de Noémie est, de plus, très attachant et l’auteur sait utiliser son profil psychologique pour amener l’enquête à poursuivre son évolution vers la reconstruction. Une bonne histoire policière originale.


mardi 19 août 2025

Comment te croire ? Pétronille Rostagnat (Harper Collins, 03/2024)

 



Comment te croire ? Pétronille Rostagnat (Harper Collins, 03/2024)

Croyez- vous à la réincarnation ? Si ce n’est pas le cas, Pétronille Rostagnat risque de vous faire changer d’avis grâce à cette enquête flirtant avec des croyances ancestrales, rondement menée, et passionnante ; personnellement, je l’ai lue d’une traite !!!

« Sa petite- fille était dotée d'une grande sensibilité, et ce depuis la naissance. Elle semblait percevoir des choses qui la dépassaient, elle ainsi que son entourage. » Jean, flic récemment à la retraite, a passé une partie de sa carrière à tenter de retrouver des personnes disparues mystérieusement. Un cas lui a toujours tenu à cœur, celui d’Alice, une adolescente disparue sept ans plus tôt. Quand sa petite- fille, Célia, six ans, lui parle de la disparue, qui semble la visiter dans ses rêves, le papi perd ses repères.

« Alors, oui, certains ont crié à la manipulation de l'enfant, mais James semblait bien avoir des souvenirs d'une vie antérieure. Selon la pédopsychothérapeute qui l'a suivi, ce seraient souvent des enfants ayant été victimes de morts violentes lors de vies précédentes qui se souviennent. » Parce que les révélations de la fillette vont s’avérer troublantes, Jean va convaincre sa fille, Florence, d’aller voir une psychologue spécialisée dans les cas enfantins de réincarnation, pour comprendre les liens susceptibles de s’être créés entre sa petite- fille et l’âme d’une défunte. Troublant, et pourtant de nombreuses recherches sont réellement menées sur des enfants qui semblent « subir » une réincarnation, tel James Leininger, un garçon américain, que cite l’auteure. Un cas avéré.

« Il y avait un monde entre la conviction d'une petite fille de six ans et la confirmation d'un test ADN. » Malgré tout, dans la police française, on reste pragmatique et seules les preuves élaborées scientifiquement auront de la valeur dans ce cold case. Jean devra se montrer plus audacieux que ses collègues et fouiller là où jamais il n’aurait envisagé de le faire, pour enfin faire toute la vérité sur cette enquête qu’il avait tant à cœur de résoudre.

Au final, un roman policier mené de main de maître, avec des liens vers l’indicible sans que cela ne soit jamais ridicule ou risible. Les personnages sont attachants et l’enquête est passionnante !