dimanche 2 octobre 2022

Un enfant sans histoire, Minh Tran Huy (Actes sud, 08/2022)



 Un enfant sans histoire, Minh Tran Huy (Actes sud, 08/2022)

💙💙💙💙

 Minh Tran Huy est une romancière et journaliste reconnue. Elle prend le pari ici de prendre la plume pour parler de son fils, Paul, qui jamais ne lira les mots couchés sur le papier par sa mère. Car Paul est autiste.

 

« Les Etats- Unis, tout comme le reste de l'Europe, ont abandonné dans les années 1960 les théories psychanalytiques attribuant l'autisme à un traumatisme psychologique. Pas la France, férue de psychanalyse depuis longtemps - c'est le pays qui compte le plus grand nombre de psychanalystes par habitant dans le monde. Le combat continue de faire rage entre ceux qui considèrent qu'un enfant comme Paul, victime d'une hypothétique, si ce n'est fantasmagorique, "blessure psychique", ne parle pas parce qu'il ne veut pas parler ; et ceux qui pensent qu'il ne parle pas parce qu'il ne peut pas parler, et qu'il faut par conséquent l'aider à acquérir les compétences (communicationnelles, cognitives, sociales, motrices…) dont disposent les enfants ordinaires. » La France, éternelle Lacanienne, a bien du mal à se secouer et à envisager d’autres prises en charge que la psychanalyse pour soigner les âmes en détresse. L’enfant va mal ? C’est la faute de sa mère…

 

« Nous sommes en 1990 et la réussite de Temple est d'ores et déjà spectaculaire: la fillette qui tapissait sa chambre de ses excréments, se débattait en hurlant pour des raisons que nul ne parvenait à saisir, l'enfant violente, incontrôlable, que son père et les psychiatres voulaient institutionnaliser, celle que ses camarades d'école, de collège, de lycée traitaient de "tarée" avec un mélange de peur et de mépris, occupe désormais le poste de professeur d'université en science animale, auquel elle a ajouté les casquettes d'ingénieure et de femme d'affaires […]. » La romancière prend appui – et espoir- sur le chemin de vie de Temple Grandin ; ébahie de constater que les soins qui lui ont permis d’avancer vers une espèce de « conformité sociétale » sont nés de l’instinct de la mère, puis de l’attention d’un professeur. Inspirant, mais ô combien culpabilisant quand on ne parvient pas à faire de même…

 

« En jetant toutes nos forces dans une bataille quotidienne contre l'autisme, Adrien et moi avons oublié qu'il s'agissait d'un marathon et non d'un sprint. Nous avons négligé de prendre soin de nous comme il l'aurait fallu et avons du mal à maintenir la tête hors de l'eau. » Les parents ont tout donné pour leur petit Paul : temps, énergie et argent. Au point d’en souffrir. 85% des parents d’enfants autistes divorcent ; comment résister malgré ces quotidiens sans répit qui se suivent et se ressemblent désespérément ?

 

Un livre qui questionne la place de l’autisme – et du handicap de manière générale – en France et qui met en avant le sentiment de culpabilité et d’impuissance que ressentent les parents quand, malgré les thérapies comportementales, les prises en charges médicales et paramédicales, leur enfant n’évolue pas.  Poignant.

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