jeudi 2 mars 2023

A prendre ou à laisser, Lionel Shriver (Belfond, 01/2023)


 

A prendre ou à laisser, Lionel Shriver (Belfond, 01/2023)

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Avec l’actuelle réforme des retraites, il est intéressant de lire un roman dont l’intrigue se base sur la fin de vie. Lionel Shriver se sert de ses personnages pour poser une question d’éthique : ne devrait- on pas prendre la responsabilité d’écourter notre vie lorsque celle- ci impose un coup conséquent à la société dans laquelle on vit ?  

 

« Avec le temps qu'il a mis à mourir, mon père a pompé toute la vie autour de lui. Il nous a peut- être même privés du peu de vitalité dont nous aurions eu besoin pour enfin fêter son décès. »  Kay a bien du mal à pleurer le père qu’elle vient d’enterrer. Durant dix années, Alzheimer avait fait de lui un homme sénile, violent et s’occuper de lui s’est révélé, pour toute la famille, être un véritable chemin de croix. Plus soulagés qu’attristés, son mari, Cyril et elle- même prennent la décision de se suicider ensemble durant l’année de leurs quatre- vingt ans.

 

« Il avait eu ses errements politiques, certes, mais Godfrey s'était toujours exprimé avec distinction, avait toujours été bien élevé, impeccable, tout ça pour finir à un stade inférieur à celui d'un animal. Au moins, les vrais animaux peuvent être euthanasiés chez le véto avant que leur état ne se dégrade. Je suis prêt à n'importe quoi pour éviter ça. » Cyril est un médecin généraliste à la retraite qui voit d’un mauvais œil l’endettement de la N.H.S. (l’équivalent britannique de notre Sécurité sociale) et accusent les personnes âgées d’en être responsables ; leur maintien en bonne santé étant plus coûteux d’année en année. Se suicider est un acte politique pour lui. Kay, elle, voit cette idée de suicide comme l’occasion de profiter pleinement de la vie (voyages, dépenses, etc.) avant le « jour J ». A partir de là, l’auteure va décliner la suite du récit en douze possibilités.

 

« Parfois la voix la corrigeait sévèrement : "Non, ce n'est pas une grosse dame inconnue venue voler le service en porcelaine ton mariage, c'est ta fille", et à ce moment- là, elle était prête à fondre en larmes. »  Dans certains cas, le suicide est annulé et on retrouve nos personnages dans des situations cocasses.

 

Au final, j’ai aimé ce roman à la forme originale. L’auteure s’amuse avec un certain vice à se moquer de nos travers d’Européens. Sa plume est acerbe et piquante. On rit et on s’énerve. J’ai toutefois regretté le côté répétitif des débuts de chapitre ; à la longue, cela m’a agacée. Mais je reconnais que l’auteure a relevé haut la main un exercice littéraire innovant. 

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